Le jour d’après
La nuit passe vite, et je suis réveillé vers 3 h du matin. Surpris d’entendre un concert de rap-raï au loin, qui va continuer jusqu’au petit matin. C’était l’animation du festival de la ville. Je vais savourer avec un plaisir non dissimulé un petit déjeuner bien fourni. Ensuite direction le magasin éphémère du MDS pour récupérer le tee-shirt finisher. Je ne m’attarde pas sur tous les autres produits à vendre. La note de l’aventure est déjà assez élevée comme ça.
Pour ce dimanche de relâche, je vais retrouver une partie de mes compagnons de « tente » et nous allons faire un tour en ville, avant de déguster un tajine dans un petit restaurant. Puis je continue seul la découverte de la ville, pour acheter quelques souvenirs, et prendre des photos. Avant de savourer dans la soirée, dans le salon cosy de l’hôtel, un thé à la menthe au son d’un duo de musiciens interprétant des chansons occidentales en anglais et en arabe.
Retour vers le futur
Le lendemain, je me réveille à nouveau très tôt, et dès 5h je suis déjà debout pour lire, me promener, assister au lever du soleil. Je vais ensuite prendre le petit-déjeuner. Ce matin, c’est une nouvelle cuisinière marocaine qui fait les galettes sur place sous nos yeux. Je m’approche a peine de la table que déjà elle arbore un sourire généreux et transparent, qui laisse deviner son coeur, même si elle reste discrète et ne dit pas un mot. Ce sourire ne va pas la quitter et va illuminer toute ma journée. Je m’en souviens encore. Il y a parfois des détails ou des paroles qui peuvent paraitre insignifiants, mais qui ont une portée insoupçonnée. En bien comme en mal d’ailleurs.
Je sors ensuite pour visiter la casbah et prendre des photos. Derniers instants de jouissance dans ce pays plein de contrastes. Je reviens ensuite finir rapidement de préparer ma valise, car, le retour à la vie normale nous attend. Le bus est là pour nous ramener à l’aéroport, où c’est un peu la joyeuse pagaille. Patrick Bauer en personne salue tous les coureurs un à un, quitte à retarder le décollage. Touchante attention de sa part.





Sur le tarmac, à travers le hublot, je vois l’étiquette à code-barre d’une valise, gisant à terre juste à l’endroit où les bagages sont avalés par le tapis roulant vers la soute. Il y a quelqu’un qui risque d’attendre longtemps sa valise à Paris… je suis mal pour lui.
Avec un peu de retard, nous voilà repartis vers notre point de départ, là où tout a commencé.
Dans l’avion qui nous ramène à notre - vraie ? - vie, chacun refait sa course, en groupe ou en solitaire, ou imagine l’accueil qu’il va recevoir à son arrivée.
Pour ma part j’ai vécu une magnifique expérience, sans aucun regret, plus facile que je ne l’avais imaginée. Le GR20 en Corse à l’été 2015 (12 jours aller-retour en autonomie) a été plus éprouvant pour moi. Pourtant, aux dires de Guy (8 participations, 70 ans), c’était « de mémoire la course la plus difficile, et la plus longue en distance. Mais vive le Marathon des Sables qui mérite maintenant réellement son appellation. » Décidément, je suis abonné. Quand j’ai fait la Diagonale des Fous en 2011 à La Réunion, c’était l’édition la plus longue avec le plus de dénivelé, et qui a connu le plus fort taux d’abandons (48%). La prochaine fois que je m’inscris sur une course, je vérifierai quand même…
Un léger crissement me sort de ma torpeur, de mon rêve. J’ouvre les yeux, le regard perdu vers l’horizon drômois qui défile à vitesse TGV. Je crois percevoir un reflet jaune sur la vitre. Je m’approche : une dune ? Non, c’est certainement un mirage… Le train ralentit. On arrive bientôt. Fin du voyage.
Fin de cette parenthèse dans ma vie. Fin d’une semaine folle, dans un autre monde, à tutoyer les hommes et le ciel, à ne vivre que pour manger, dormir et courir. A fouler ces étendues millénaires, chargées d’histoire. J’ajuste mon sac à dos, rend bien visible mon tee shirt finisher. Je n’aime pas trop me mettre en avant dans la vie courante, mais aujourd’hui, c’est particulier. Je suis quand même fier ce que j’ai accompli, et je veux le montrer, même si ceux qui voient ce simple tee-shirt ne peuvent pas imaginer tous les sacrifices, la souffrance, et aussi le plaisir qu’il représente. Il est le symbole d’une « semaine très intense qui fait de vous une meilleure personne. Car le désert vous aide à faire face à la vie et à donner le meilleur de vous même », comme le disait Chema, espagnol, 6e en 2015.

Valence. 20h11. Claac. Un bruit sourd à nouveau. La porte s'ouvre pour nous délivrer de cette carcasse de métal et nous rendre la liberté. Je n'ai plus l'habitude d’être enfermé comme ça, après cette orgie de vent et de sable n pleine nature. Il va falloir retrouver un nouveau rythme, tout en rêvant à de nouvelles aventures, à de nouveaux voyages au près ou au loin, et pourquoi pas à de nouveaux horizons de désert. J’imagine déjà de longues discussions avec ma femme. Mais pour l’instant, nous sommes super contents de nous retrouver.
C’est le début d’une nouvelle tranche de vie, la reprise de la routine dont il faut essayer de se débarrasser en partie pour mieux enchanter la vie, l’espoir que cette aventure aura un peu servi à contribuer au mieux-être des habitants de Guié.
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